Flic de Paris


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En 1967, Jehan Jonas est en pleine forme et nous sort deux bijoux, Flic de Paris et Mentalité française. En 1970, son ami Jean-Marie Vivier rechantera ces deux chansons qui seront alors censurées et interdites d’antenne, leur donnant leurs lettres de noblesse sociale. Il eût été dommage que Flic de Paris ne soit pas pointée du doigt par les parvenus, les nantis, nos maîtres d’ici bas, très bas.

Bien sûr, au vu des brutalités policières de mai-juin 68 à venir, on pourrait dire que Jehan Jonas était bien gentil dans sa critique de ces chiens de policiers. On parle en effet de trente victimes, tuées par la police, maquillées en accident de la route ou autre… en plus des six morts officiels.
Nonobstant, Flic de Paris reste d’actualité et annonce la couleur d’entrée de jeu: « t’es la flicaille des gens honnêtes… » vous savez ceux qui votent, croient en la médecine pasteurienne, ne font ni grève ni sabotage, avalent toutes les couleuvres, et trouvent que s’il n’y avait pas la police, hein…
Les autres, qui se sont un jour ou l’autre frittés aux forces de l’ordre, apprécieront ce couplet: « Dans le panier de la connerie/ Tu vas taper sur les gars qui/ N’ont pas voulu marcher tout droit/ Et qu’ton odeur n’impressionne pas. »
Jehan Jonas, mort trop jeune, nous laisse une discographie originale, sensible, iconoclaste. Il fait partie de ces météorites qui chantent la vie, toute la vie, dont la résistance, la lutte, la critique sociale. Il aurait même été membre d’un groupe anarchiste informel et éphémère, les JAP (Jeunesses Anarchistes Pacifistes).
En tout cas, il est réjouissant de le réécouter et de chanter avec lui que, toi, le flic, que tu en aies conscience ou non, ben, « T’es jamais qu’un larbin de l’Etat! »
Certains répètent parfois que derrière le flic il faut voir l’homme, oubliant que c’est dans la pratique que ça se vérifie, que le flic qui se réduit à son état, à son uniforme, s’atrophie lui-même de sa condition d’humain, toute son activité dirigée pour imposer ce monde inhumain, dans lequel nous nous débattons pour survivre.
Jehan Jonas confirme : « T’es d’la pèlerine et rien en d’ssous/ De la baudruche assermentée/ Gonflée au vent de la société. »
Dans les années ’60 et ’70 (à l’instar de Renaud, en 1975 : « Société, tu m’auras pas… »), la société représente la vie sous le capital, contraignante, chiante, abrutissante et les sbires qui la défendent. Ce mot avait une épaisseur sociale qu’elle a perdue et c’est dommage. La novlangue est passée par là, noyant les antagonismes de classes et imposant… le citoyen !
Heureusement, avec le mouvement des Gilets jaunes, et ses superbes expressions chantées, la clarification tend à se faire, au grand dam des gauchistes de toute obédience et des postmodernistes auto-satisfaits.
En 2009, Skalpel nous donne une version rapée originale de Flic de Paris.
Vive la Commune !


Paroles

T´es qu´un flic de Paris, t´es qu´un flic de Paris

T´es la flicaille des gens honnêtes
Avec un oeil dans nos assiettes,
Tu fais l´beau aux sorties de l´usine
L´air agrippant de Steve Mac Queen

Les pigeons font sur nos toitures
C´que tu fais toi sur nos voitures,
Autant qu´ils visent les monuments
Que toi t´évites les gouvernants

T´es qu´un flic de Paris, t´es qu´un flic de Paris

T´as d´l´avancement qui s´croise les bras
Dans les idées lorsque t´en as,
Tu couches à droite pour le turbin,
Tu votes à gauche pour t´faire du bien

Comme une Peau d´Âne qui aurait pas tout,
T´es d´la pèlerine et rien en d´ssous,
De la baudruche assermentée
Gonflée au vent de la société

Bref un flic de Paris, bref un flic de Paris

Dans le panier de la connerie
Tu vas taper sur les gars qui
N´ont pas voulu marcher tout droit
Et qu´ton odeur n´impressionne pas

Tu m´diras qu´tu fais ton boulot
Qu´t´es pas payé pour le cerveau,
Heureusement qu´on t´paye pas pour ça
Parce que sinon tu boufferais quoi?

P´t-être les flics de Paris, p´t-être les flics de Paris

Depuis qu´t´as prononcé tes voeux
Tu as l´esprit qui boite un peu,
Moitié par les coups du regret,
Moitié par les coups d´beaujolais

Si tu fous tes amis au clou
Pour un danger qui t´serre le cou,
Garde le ridicule qu´on te donne,
C´est l´seul au moins qui n´tue personne

Même les flics de Paris, même les flics de Paris

Chez toi, quand on pose des questions,
C´est pas à coups d´conversation,
Même quand t´interroges le bon Dieu
Y ressort jamais avec des bleus

T´as la manière d´te rendre utile
En uniforme ou en civil,
T´as beau bouffer du Gargantua,
T´es jamais qu´un larbin de l´Etat

Et un flic de Paris, et un flic de Paris

Enveloppé de ta sépulture
On t´sortira d´la préfecture
Pour un p´tit coin à concessions
Où l’on f´ra pousser des bâtons

En attendant tu fais des p´tits,
Qui bouchent le soleil de Paris
Pour que continue la synthèse
De cette spécialité française

Qu´est le flic de Paris, qu´est le flic de Paris

 


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