Aznavour comme vous ne l’avez peut-être pas connu, ça vous dirait ? Commençons avec L’amour et la guerre dont nous vous livrons le commentaire de wikipedia :
« En 1960, en pleine guerre d’Algérie, la chanson pacifiste L’amour et la guerre, écrite par Bernard Dimey et mise en musique et interprétée par Charles Aznavour, est interdite sur les ondes nationales. Elle sera la bande son du film de Claude Autant-Lara, Tu ne tueras point. »
Charles Aznavour chanteur contestataire ? N’allons pas jusque là, mais saluons son audace avec cette belle chanson.
Début 1960, Aznavour ne connait pas encore l’immense succès populaire qui sera le sien, avec des chansons que tous ont fredonnées : La Mamma, La Bohème, Emmenez-moi, etc.
En 1966, il récidive avec une chanson dont il est l’auteur et l’interprète, Les enfants de la guerre, qui, elle aussi, a sa place dans notre tour d’horizon de chants de lutte. « Ils ont vu la misère/Recouvrir leurs élans/Et des mains étrangères/Égorger leurs printemps. » Nous pensons à la chanson de Serge Utgé-Royo, Une énorme boule rouge, qui développe un thème voisin. Une autre pensée à ces chers ingénieurs russes qui ont imaginé et conçu des Kalachnikovs pour enfants. Il fallait le faire !
Des chansons de cette trempe dénotent dans le répertoire plutôt conventionnel de Charles Aznavour. Tant mieux. Quittons-nous avec Deux guitares (1960), qui rend compte du mal-être de cette vie dans ce monde imbécile et une dérisoire tentative de s’en échapper, de la fuir… même un instant, une nuit :
Paroles
L’amour et la guerre
Pourquoi donc irais-je encore à la guerre
Après ce que j’ai vu, avec ce que je sais?
Où sont-ils à présent les héros de naguère?
Ils sont allés trop loin chercher la vérité
Quel que soit le printemps, les cigognes reviennent
Que de fois, le cœur gros, je les ai vues passer
Elles berçaient pour moi des rêveries anciennes
Illusions d’un enfant dont il n’est rien resté
Toutes les fleurs sont mortes aux fusils de nos pères
Bleuets, coquelicots, d’un jardin dévasté
J’ai compris maintenant ce qu’il me reste à faire
Ne comptez pas sur moi, si vous recommencez
Tout ce que l’on apprend dans le regard des femmes
Ni le feu, ni le fer n’y pourront jamais rien
Car l’amour – et lui seul – survit parmi les flammes
Je ferai ce qu’il faut pour défendre le mien
Pourquoi donc irais-je offrir ma jeunesse
Alors que le bonheur est peut-être à deux pas?
Je suis là pour t’aimer, je veux t’aimer sans cesse
Afin que le soleil se lève sur nos pas
Les enfants de la guerre
Les enfants de la guerre
Ne sont pas des enfants
Ils ont l’âge de pierre
du fer et du sang
Sur les larmes de mères
Ils ont ouvert les yeux
Par des jours sans mystère
Et sur un monde en feu
Les enfants de la guerre
Ne sont pas des enfants
Ils ont connu la terre
A feu et à sang
Ils ont eu des chimères
Pour aiguiser leurs dents
Et pris des cimetières
Pour des jardins d’enfants
Ces enfants de l’orage
Et des jours incertains
Qui avaient le visage
Creusé par la faim
Ont vieilli avant l’âge
Et grandi sans secours
Sans toucher l’héritage
Que doit léguer l’amour
Les enfants de la guerre
Ne sont pas des enfants
Ils ont vu la colère
Étouffer leurs chants
Ont appris à se taire
Et à serrer les poings
Quand les voix mensongères
Leur dictaient leur destin
Les enfants de la guerre
Ne sont pas des enfants
Avec leur mine fière
Et leurs yeux trop grands
Ils ont vu la misère
Recouvrir leurs élans
Et des mains étrangères
Égorger leurs printemps
Ces enfants sans enfance
Sans jeunesse et sans joie
Qui tremblaient sans défense
De peine et de froid
Qui défiaient la souffrance
Et taisaient leurs émois
Mais vivaient d’espérance
Sont comme toi et moi
Des amants de misère
De malheureux amants
Aux amours singulières
Aux rêves changeants
Qui cherchent la lumière
Mais la craignent pourtant
Car
Les amants de la guerre
Sont restés des enfants
Deux guitares
Deux tziganes, sans répit, grattent leurs guitares
Ranimant du fond des nuits toute ma mémoire
Sans savoir que roule en moi un flot de détresse
Font renaître sous leurs doigts ma folle jeunesse
E khê raz, is cho raz
Is chê mênaga mênaga raz
E khê raz, is cho raz
Is cho mênaga mênaga raz
Jouez tziganes, jouez pour moi avec vos deux flammes
Afin de couvrir la voix qui dit à mon âme
Où as-tu mal? Pourquoi as-tu mal, ah?
T’as mal à la tête mais
Bois un peu moins aujourd’hui
Tu boiras plus demain
Et encore plus après demain
E khê raz, is cho raz
Is chê mênaga mênaga raz
E khê raz, is cho raz
Is cho mênaga mênaga raz
Je veux rire, je veux chanter
Et saouler ma peine
Pour oublier le passé qu’avec moi je traîne
Allez, apportez-moi du vin fort
Car le vin délivre
Oh, versez, versez m’en encore
Pour que je m’enivre
E khê raz, is cho raz
Is chê mênaga mênaga raz
E khê raz, is cho raz
Is cho mênaga mênaga raz
Deux guitares en ma pensée jettent un trouble immense
M’expliquant la vanité de notre existence
Que vivons-nous ? Pourquoi vivons-nous ?
Quelle est la raison d’être ?
Tu es vivant aujourd’hui, tu seras mort demain
Et encore plus après demain
La la la ekh
Enê is chê, is chê, is chê mênaga mênaga mênaga eh
Enê is chê raz, chê mênaga mênaga raz
Quand je serais ivre mort
Faible et lamentable
Et que vous verrez mon corps rouler sous la table, alors
Alors vous pourrez cesser vos chants qui résonnent
Mais en attendant, jouez
Jouez j’ordonne
E khê raz, is cho raz
Is chê mênaga mênaga raz
E khê raz, is cho raz
Is cho mênaga mênaga raz