A bas le travail ! 2- L’entrée.


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Pour l’explication d’une telle démarche, voir A bas le travail ! 1- L’apéro, dans la rubrique Divers.
Parmi les nombreuses chansons contre le travail se trouvant sur ce site, vous pouvez réécouter Ne rêvez pas, de Prévert, dans la rubrique Analyses.
1- Nous aimons bien Boris Vian, son humour, son impertinence, son engagement. Voir Déserteurs, dans la rubrique Divers, dans lequel nous parlons de son fameux Déserteur. En 1958, il co-écrit Je peux pas travailler, avec son ami Henri Salvador, qui l’enregistrera en 1978.
En 1965, Henri-le-facétieux chante Le travail c’est la santé, dont l’antidote… rien faire c’est la conserver plaira immensément aux prolos !
Le ton drolatique ne diminue pas ce coup de griffe au tripalium !
Bon, on s’écoute Je peux pas travailler :

Boris Vian aurait dit : « Si le travail c’est l’opium du peuple, alors je ne veux pas finir drogué ! »
Voici un court texte de Boris, de 1958, jamais enregistré, intitulé Sermonette 1 :
Jamais je n’ai eu besoin
D’un réveille-matin
Je me lève tout seul quand sonnent les 12 coups de midi
Jamais je n’ai très envie
De sortir du lit
Pour aller miner ma santé à travailler
Je ne vois pas pourquoi,
Oh, je ne vois pas
Pourquoi l’on dit qu’il faut tâcher
De gagner sa vie ? ?
Gagner sa vie, pour quoi
Quand on l’a déjà
Je ne sais pas si c’est si malin que l’on croit.
2- C’est dans un esprit similaire que Zoufris Maracas nous avoue, en 2012, J’aime pas travailler :

On pourrait trouver « légère » cette dénonciation du travail. Peut-être. Pourtant, c’est bien le tripalium qui nous meurtrit et nous abîme quotidiennement. N’empêche, la glande de Zoufris lui permet de nous régaler avec ses textes et ses musiques, comme son Démocratie, à voir dans la rubrique Analyses.
Karl Marx, dans ses Manuscrits de 1844, dont nous recommandons la lecture, propose une critique radicale du travail. A lire un extrait célèbre en annexe.
3- François Béranger, en 1973, utilise l’humour, lui aussi, pour nous parler du monde du travail, si ennuyeux, avec Le tango de l’ennui :
https://www.youtube.com/watch?v=F8NDbSDjzfQ
La lecture du Droit à la paresse, de Paul Lafargue (1880), ne sera pas inutile.
4- En 2009, Marco Valdo parodie une célèbre chanson avec La fermeture. Nous n’avons pas de version chantée, mais vous pouvez chanter le texte ci-dessous, sur l’air du Pénitencier de Johnny Halliday, une reprise de la célébrissime House of the rising sun.
5- Finissons cette entrée, et avant d’attaquer le plat de résistance… au travail, voici, en 1995, une malicieuse chanson de Dominique A, Le travail :
https://www.youtube.com/watch?v=_xDUMGoXVUU
Encore et toujours :
                                         A bas le travail, l’exploitation, le capitalisme !


Paroles

Je peux pas travailler

Ohlala, quelle bonne femme j’ai épousé… attention la voilà, la voilà…
Tu m’engueules sans arrêter parce qu’on n’a pas d’argent
Et qu’on ne peut rien acheter pour nous ou tes parents
Mais…

Je peux pas travailler debout parce que ça me fait mal aux genoux
Je peux pas travailler assis, ça me fait mal au coccyx
Aujourd’hui, le Directeur des Galeries Lafleur
M’a offert une situation de garçon d’ascenseur
Mais…

Je peux pas travailler en l’air
Ça me donne une crise de nerfs
Je peux pas travailler en boîte
J’ai les poumons comme de l’ouate

La voisine m’a proposé de laver ses carreaux
Et elle m’a apporté un énorme escabeau
Mais…

Je peux pas travailler perché,
J’ai le foie qui va se décrocher
Je pourrais travailler couché
Mais personne veut m’embaucher

Onésime qui tient l’orchestre au dancing du carrefour
M’a demandé d’entrer chez lui pour jouer du tambour
Mais…

Je peux pas travailler dans le bruit
Ça me donne des tas de maladies
Je peux pas travailler des bras
J’ai l’épaule qui ne tourne pas

Monsieur Jean le commerçant qui a des plantations
Me dit « Jules, viens donc chez nous, faut cueillir le coton »
Mais…

Je peux pas travailler courbé
J’ai les doigts de pieds recourbés
Je peux pas travailler penché
Ma colonne veut pas se plier

La Julie, une bonne copine qui bosse à l’extérieur
Me suggère de m’occuper de son petit intérieur
Chouette!

Je vais pouvoir travailler couché
T’auras plus rien à me reprocher
Mais je vois pas pourquoi t’es fâchée
Ton bonhomme est embauché…
Alors toi, tu es marrante… moi qui avais enfin trouvé le travail de mes rêves…

J’aime pas travailler

Travailler plus, gagner plus, vous aurez moins de temps, le temps c’est de l’argent, hè bien voilà…

J’aime pas travailler debout
J’aime pas travailler assis
J’aime pas travailler à genoux
J’aime pas ouais travailler du tout

Moi ce que j’aime c’est glander
Quand je glande faut pas m’emmerder
Et pour être sûr de me lever tard
Tous les soirs je me fume un pétard

J’aime pas travailler patron
Tu crois que je te prends pour un con
Tu aimerais bien me virer
Si je t’avais laissé m’embaucher

Même si tu me trouves un emploi
Saches que je ne bosserai pas pour toi
Je préfère rester au chômage
A me dorer le cul sur une plage

Et si c’est pas très lucratif
Moi j’essaie de rester positif
Et si je dois redoubler d’effort
Alors directement je m’endors

Et si un jour un beau matin
Le moment d’aller au turbin
Je prendrai mes jambes à mon coup
Et je partitai pour le Pérou

Dans la Cordillère des Andes
Je créerai la république de la glande
Travailler sera interdit
Maximum syndical garanti.

Karl Marx, Manuscrits de 1844

« Or, en quoi consiste l’aliénation du travail ? D’abord dans le fait que le travail est extérieur à l’ouvrier, c’est à dire qu’il n’appartient pas à son essence, que donc, dans son travail, celui-ci ne s’affirme pas mais se nie, ne se sent pas à l’aise, mais malheureux, ne déploie pas une libre activité physique et intellectuelle, mais mortifie son corps et ruine son esprit. En conséquence, l’ouvrier n’a le sentiment d’être auprès de lui-même qu’en dehors du travail, et, dans le travail, il se sent en dehors de soi. Il est comme chez lui  quand il ne travaille pas et, quand il travaille, il ne se sent pas chez lui. Son travail n’est donc pas volontaire mais contraint, c’est du travail forcé. Il n’est donc pas la satisfaction d’un besoin, mais seulement un moyen de satisfaire des besoins en dehors du travail. Le caractère étranger du travail apparaît nettement dans le fait que, dès qu’il n’existe pas de contrainte physique ou autre, le travail est fui comme la peste. Le travail extérieur, le travail dans lequel l’homme s’aliène, est un travail de sacrifice de soi, de mortification. Enfin, le caractère extérieur à l’ouvrier du travail apparaît dans le fait qu’il n’est pas son bien propre, mais celui d’un autre, qu’il ne lui appartient pas, que dans le travail  l’ouvrier ne s’appartient pas lui-même, mais appartient à un autre. »
 
Le tango de l’ennui

Anastasie, l’ennui m’anesthésie
Je mesure aujourd’hui, combien favorisé
J’étais quand je travaillais chez P’tit Louis
À Billancourt-sur-Seine, dans l’entrepôt modèle
Je participais à l’expansion
À six heures du matin
Levé comme un aveugle
Se laver, avaler son café
S’enfoncer dans le noir, prendre le bus d’assaut
Piétiner dans le métro, c’était le pied
Anastasie, l’ennui m’anesthésie

S’engouffrer au vestiaire, cavaler pour pointer
Enlever sa casquette devant le chef
Faire tourner la machine, baigner toute la journée
Dans l’huile polluée, quelle santé
Surtout ne pas parler
Mais ne pas trop rêver
C’est comme ça que les accidents arrivent
Et puis le soir venu, repartir dans l’autre sens
Pour le même enthousiasmant voyage
Anastasie, l’ennui m’anesthésie

Heureusement un jour, sur le Pont de Sèvres-Montreuil
Dans le bain de vapeur quotidien
Dans la demi-conscience, au hasard d’un chaos
J’ai senti dans mon dos tes deux seins
Je me suis retourné
Je t’ai bien regardée
Et j’ai mis mes deux mains sur tes seins
Tu m’as bien regardé et tu n’a pas bronché
Bien mieux tu as souri et j’ai dit:
Anastasie, l’ennui m’anesthésie

Tu t’appelais Ernestine ou peut-être Honorine
Mais moi je préfère Anastasie
On a été chez moi, ça a duré des mois
J’ai oublié d’aller chez P’tit Louis
Qu’est-ce qu’on peut voyager
Dans une petite carrée
Tu m’as emmené partout où c’est bon
Et puis un jour comme ça pour éviter l’ennui
On a décidé de se séparer
Anastasie, l’ennui m’anesthésie

La morale de ce tango tout-à-fait utopique
Mais c’est pas interdit de rêver
C’est que si tous les prolos au lieu d’aller pointer
Décidaient un jour de s’arrêter
Pour aller prendre leur pied où que ça leur plairait
Ça serait bien moins polluant que l’ennui
Il n’y aurait plus de gars comme moi
Comme j’étais autrefois
Qui se répéteraient tout le temps pour tuer le temps
Anastasie, l’ennui m’anesthésie.

La fermeture

La boîte où j’ai travaillé
Bientôt sera fermée
Au chômage, je finirai ma vie
Comme d’autres gars l’ont finie.

Pour moi, ma mère a donné
sa robe de mariée
Pourra-t-elle jamais leur pardonner
De me faire ainsi désespérer

Le soleil n’est pas fait pour nous
Nous, on peut juste se cacher
On est pauvre quand on a rien du tout
Les riches veulent toujours tout gagner.

Ô mères, écoutez-moi
Ne laissez jamais vos garçons
Crever chaque jour pour des patrons
Qui ne les respectent même pas.

Toi, la fille qui a travaillé
Ils t’ont trop fait pleurer
Les larmes de colère que tu as versées
Il ne faut jamais les oublier.

La boîte où j’ai travaillé
Vient d’être fermée
Au chômage, je finirai ma vie
Comme d’autres gars l’ont finie.

Le travail

Je revenais du travail
Personne ne m’attendait
J’abandonnais mon travail
Et quelqu’un survenait
Je reprenais mon travail
Ce quelqu’un s’ennuyait
Je revenais du travail
Et seul me retrouvais

Je revenais du travail
Personne ne m’attendait
J’abandonnais mon travail
Et quelqu’un survenait
Je reprenais mon travail
Ce quelqu’un s’emportait
Je revenais du travail
Et seul me retrouvais

On m’enlevait mon travail
Plus seul je me sentais
Je recherchais du travail
Là plus tout seul j’étais
Je recherchais du travail
Où je suis il faisait
Je renonçais au travail
Qui alors m’ignorait

L’appartement de taille
A être intimidant
Pour l’homme seul me poussait
À chercher du travail
Qui maintenant m’attend
Et m’attendra longtemps
Qui maintenant m’attend et m’attend
Et m’attendra longtemps

Je recherchais du travail
Nul autre n’y croyait
Je recherchais du travail
Pas assez snob j’étais
Je renonçais au travail
Tu dors trop il faisait
Je renonçais au travail
Toujours plus seul j’étais
La la la la la la…


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